20071210 - Lettre à Jeanine.
[envoyé à 6h 12 ']
Chère Jeanine,
je te réponds de manière un peu moins lapidaire aujourd'hui, hier soir j'étais fatigué, je ne me suis aperçu que vers 14 heures qu'on était dimanche, juste après la fin de la réalisation de la revue, et après une semaine très chargée d'un point de vue horaire; comme je n'ai rien à faire, je travaille 18 heures par jour; j'ai réalisé la mise en page et la publication des trois livres en dix jours, sachant qu'il devrait me rester quelques jours pour préparer mon quart d'heure de mercredi; je pourrai y consacrer pas mal de temps, je vais essayer de faire quelque chose de bien; je m'y mets tout à l'heure; en fait il y a une demi-heure, en manipulant la version de JAM, il m'est venu une idée de séminaire, ou de colloque, dont le thème serait: "comment j'ai lu certains de mes Lacan", (pour faire pendant évidemment, à l'article de Raymond Queneau, "comment j'ai écrit certains de mes livres"); il s'agirait de rendre compte, (en colloque), de la manière dont, à un moment, quelque chose se passe au contact avec le livre d'un séminaire, en particulier, quand on lit Lacan, d'un rapport particulier à un séminaire particulier... Ce serait une bonne entrée en matière d'exposition du thème de la subjectivation, qui est tout de même une notion assez peu limpide, dont la clarté se dissipe à mesure qu'on la trouble, et comment ne pas la troubler en l'examinant? Ou alors, en séminaire, mais il faudrait être plusieurs à vouloir se mouiller la chemise dans une affaire finalement très personnelle... Qu'en penses-tu? Je ne pense pas nécessairement à un colloque très formel dans le cadre très formel de l'ACF, mais à quelque chose de plus interculturel, et toutefois moins lourd que le "groupe de contact". Enfin je lance l'idée comme ça, il y a eu ici, chez moi, lancé par Serge Hajlblum dont tu connais certainement les travaux sur la voix, (clique ici), un colloque d'une ou deux semaines en été, à 5-6, il y a deux ans, -plus jamais ça!- Excuse-moi, j'ai pris l'habitude de mettre des liens url partout, tout en sachant très bien que peu de gens les lisent, ces sous-entendus; enfin, j'aimerais bien que tu les lises (...). Voilà, j'en dis là plus que je ne devrais...
Pour en venir à la question [que tu soulèves], je ne sais quoi te dire, à mon tour; que des gens désirent se proposer comme psychanalystes, je le comprends, malheureusement. Pour ma part je le fais parce que je peux le faire et parce que je ne peux pas ne pas le faire; je suis également confronté à des démarches et des questions de la part de gens plus jeunes que ma position très (in-)-visible et excentrique interpelle, et souvent je comprends que ce sont des gens qui ont déjà payé un tribut très élevé et qui sont prêts à aller encore plus loin, même s'ils ne me paraissent que rarement avoir saisi de quoi il retourne en matière de travail avec l'inconscient, le how do tant que le what has to be done ou le what does it mean?
Pour le what does it mean, il y en a un exemple merveilleux dans le séminaire V, j'ai coché d'une double barre dans la marge vers le milieu de la page 310, sur les trois lignes qui commencent par "jeunes mâles", "c'est à dire", "qu'il y a", à lire jusqu'au repère 3, p 311, va voir ce passage, puisque tu l'as en main, ce séminaire, de toutes façons, les jours qui viennent, et tu verras qu'il y a là un merveilleux exemple du "what does it mean", du comment lire Freud avec Jacques Lacan, parce qu'après, eh bien il y a la question d'où il le tire, son savoir, c'est à dire la question de savoir qu'est-ce qui est présupposé de savoir pour pouvoir former le savoir qu'il énonce, et l'autre question, beaucoup plus fondamentale, de comprendre ce qui le soutient dans la constitution de l'érudition qui lui permet de métaboliser son angoisse extrême autant qu'inconsciente par le travail de la métaphore, qui lui permet de la métaboliser parce que cette érudition, là, dans ce passage qui sous tend la manipulation de la linguistique, des philosophes grecs et chrétiens, Moïse, tout Freud, Sophocle et le meurtre du père, que cette érudition elle occupe la place de ce qui serait rempli par la Todesangst la plus radicale, après tout, qu'est-il allé faire en analyse, Lacan? Et ce passage a été merveilleusement servi par ce qu' écrit Jacques-Alain Miller, qui suit comme souvent ce qu'on appelle [à tort la sténotypie alors qu'il s'agit de la dactylographie de] la sténotypie: si tu regardes de près, (le passage dans la sténotypie est p 17- (128), tu t'apercevras que la seule modification qu'il amène, c'est le découpage des paragraphes, et rien qu'avec l'effet de ce découpage, on lit le texte différemment; tu observeras également qu'il n'a pas repris les schémas qui se trouvent p 19- (130), pour une raison très simple, il n'était pas là et ne peut les garantir, puisqu'ils n'ont pas été vérifiés par Lacan; et, de fait tu constateras qu'ils sont illisibles; donc, il fait le choix de l'écriture cursive de la parole, il écrit ce qui a été dit, au plus près (...). Donc, vois-tu, on peut largement passer un an à travailler rien que sur ce passage d'une page, si l'on suit les références que Lacan donne, et qui, si l'on veut se saisir de ce qu'il énonce, sont impératives, hélas...
tiens je t'envoie le lien utile
http://www.ecole-lacanienne.net/stenos/seminaireV/1958.03.26.pdf
et la pièce en question en doc jointe [ici en lien url]
http://www.ecole-lacanienne.net/stenos/seminaireV/1958.03.26.pdf
Généralement pour trouver les textes je passe par mon blog, c'est plus rapide, c'est même pour ça qu'il est fait, c'est un didacticiel de psychanalyse qui s'appuie sur le web lacanien dans son ensemble, et à ma connaissance, le seul; c'est même pour ça que c'est une savonnette, à la différence d'Oedipe qui est un pot de glue; c'est même carrément l'anti-oedipe, ce blog, pas du tout un portail, juste le contraire, un échangeur qui mêne aussi bien aux lieux les plus importants de la psychanalyse qu'aux raretés, aux dictionnaires, etc; quand je vois le boulot qui y est fait et le relativement peu d'usage qui en est fait, dans la région au moins, parce qu'ailleurs, il y a des gens qui ont compris à quoi il sert... Mais tout de même la diffusion papier est très importante parce qu'elle est belle, (je n'ai pas vu les exemplaires brochés et ne les verrai que dans quelques semaines, c'est imprimé aux states, mais j'ai les pdf, et crois-moi, c'est beau; c'est de la belle revue, un concept totalement nouveau de revue de psychanalyse qui se vendra aux états-unis, (d'où le nom), et peut-être même en France... C'est un peu cher peut-être mais c'est également un livre de photo, il y en a 39, et la fabrication du livre, sa publication, est la seule manière pratique de me garantir un copyright sur ces textes et ces images... qu'on peut tirer en 50x60, la définition est suffisante... Ce n'est pas que je pense que cela m'enrichira un jour mais mes petits enfants peut-être...
Bon, je m'égare, on reparlera... Avec le what does it mean il y a également le so what; que faire de tous ces gens qui veulent toucher à la psychanalyse tout en ayant une position tout aussi phobique que Lacan mais sans retourner à Freud comme il le fait? Tu sais, ce texte, "les prolégomènes etc", la première version a douze ans d'âge, les éditeurs ont peur de perdre de l'argent, dont acte; ça ne m'a rien coûté de le rendre disponible, et quand j'en aurais vendu autant d'exemplaires que le nombre de fichier word que j'ai distribué, soit une cinquantaine, je saurai que la tendance française à me snober* se sera inversée...
Allez, je vais travailler un peu... Bonne journée,
Didier
*Ndé: Comme dit Noémie, « Papa n'est pas Modeste ». Ah ça c'est bien vrai ça. Vous vous rappelez de la BD « Modeste et Pompon »? Mais quand elle m'appelle « Père », ça me va aussi bien. Pas sûre qu'elle soit si croûlante, la fonction paternelle des croûlants. Il y a encore des d'jeun's pour en soutenir l'illusion; il n'y a plus qu'à espérer que la police de caractère ne leur fatigue pas trop les moeurs... Y'a des moeurs et des keurs dans mon hlm... Baste!
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