lundi 26 mai 2008

Précis et judicieux


J'ai une proposition à vous soumettre.


Si, lorsque vous demandez à un médecin que vous consultez de vous prescrire un scanner parce que vous pensez que vous êtes atteint d'une maladie grave, un cancer, et que celui-ci vous rassure de quelques bonnes paroles qu' il n' y a aucune raison de faire un examen, vous laisse partir sans prescription, diagnostic, examen ou conseil d' aller consulter un autre médecin, faites-le savoir, fuyez sa consultation, et consultez autant qu' il faudra jusqu' à ce que les avis convergents auront assez de solidité et d'étayage pour vous convaincre au cas où rien n' est détecté.


Cela vous sauvera sans doute la vie.



Certains médecins en effet se sont fait une idée idéalisée et aberrante des " bonnes pratiques " que la triste gestion droitière, calculatrice mais piètre comptable de la sécurité sociale soumet à leur exercice, -ce dont ils peuvent très largement se décoller-. D' autres médecins sont hélas très incompétents. D' autres encore ont des comptes à régler pour des raisons transférentielles avec certaines professions, psy notamment mais d' autres aussi.


Une amie infirmière psychiatrique en Alsace à qui son médecin a dit que " c'était dans la tête ", jusqu' à ce qu'elle aille consulter un rhumatologue qui blêmit en lui découvrant une maladie de Hodgkin au stade IV; une autre amie infirmière, dans les pyrénées, déja soignée auparavant pour un cancer, que son médecin refuse d' écouter durant quelques mois, malgré ses protestations, jusqu' à ce que la petite tache grossisse; moi-même, qu'un spécialiste de la bouche a rassuré après une biopsie bâclée au cabinet, assurant qu' il s'agissait de stress, (-intéressant, n' est-ce pas, le stress : pas de preuve, pas d' argument, et surtout, pas de contenu psychique); et à qui un médecin, averti pourtant des antécédents, a à nouveau refusé un scanner sous le prétexte " qu'on n' en fait pas pour cela " ... et pour finir, reçoit une engueulade (polie tout de même si un fort déplacée) de l' orl (très chaleureux) consulté à l' IRC de Toulouse, pour devoir avoir été suffisamment averti pour ne pas "laisser traîner" ... -et la confiance faite au médecin ? - Encore faut-il qu'il en soit digne.


Je n' ai pas cherché à collationner les histoires : mais chaque fois que j' ai posé la question à un malade atteint gravement j' ai trouvé en antécédent le récit d'un médecin qui avait refusé d' écouter.


Concernant ce qui m' arrive, et pour élever le débat, il se trouve que le médecin que j' ai consulté dans le village de N. (32), fait partie d' un groupe de médecins qui se réunissent régulièrement pour discuter de leurs « cas » ; ils ont cette tradition du « premier patient du mardi matin » dont ils font récit après tirage au sort; en voilà au moins un qui sera un peu mieux traité ; ces réunions se font « à la Balint » , mais sans psychanalyste, et ce, alors que jamais seulement l'un d'entre eux eût été en analyse ou eût jamais participé à un vrai groupe Balint. D' ailleurs, une des participantes me l'a assuré, tous les participants se sont formés en quelques week-ends à la programmation neuro-linguistique, (la trop fameuse PNL), dont ils ont eu grâce à sa publicité autoréférente et massive, pratique grâce à laquelle les participants se trouvent dès lors à leurs yeux parés, mais de quoi donc ? D'une très imaginaire maîtrise de la communication ; qui n'est rien d'autre que la croyance fermement martelée, par des techniques d'hypnose, de l' adéquation pleine et entière entre leur pensée projetée sur l' autre et la réalité de l' autre. Il est facile d'en convaincre des individus que leur formation ne prépare pas au maniement critique de concepts psychologiques ou philosophiques qui demandent des années d'études critiques et de préparation éristique, heuristique, et méthodologique. Les effets de transferts latéraux ne sont même pas entr' aperçus et pire, soupçonnés. C' est en somme le règne de l'innocence paradisiaque, où l' arbre de la connaissance, c'est la reconnaissance par l'autre de l'intention noble de soigner bien ; alors il n'y a rien à chercher ailleurs, tout ce qu'il pourrait y avoir à savoir est supposé déjà su dans le groupe ; et ce qui se trouve divisé dans ce partage, et perd de sa densité dans ce type de division, c'est l' hypothèse même qu' une telle structure groupale dispose du savoir pertinent pour aborder les questions transférentielles, alors qu'il n'en a ni le concept, ni la méthode, ni les exigences éthiques. Rien de bon ne peut émerger d'une pratique telle, on ne peut en attendre que des dégâts dans un contexte de méconnaissances et de dénis.


Ainsi l'on voit comment l' ignorance, dont Lacan rappelait, après Descartes, le caractère passionnel, trouve ses alliances avec les délires partagés pour protéger des pratiques perverties (celle des groupes Balint), perverses (PNL), mortifères (association de méconnaissances), et de ce fait crée et propage des maladies iatrogènes sous le meilleur prétexte de rationalisation des soins et des coûts, tout cela vous a un petit goût de thé chez la baronne, en toute innocence pétris de bons sentiments. L' éthique médicale existe, elle est très exigeante, c'est très dommage que si peu de médecins soient assez rigoureux, humbles et honnêtes pour se tenir à sa hauteur ; mais il y en a, j' en fréquente quelques-uns, qui m'ont convaincu qu' il y a une possibilité de dialogue entre médecins et psychanalystes, entre médecine et psychanalyse. Les psychanalystes consultent des médecins, et il est beaucoup moins massivement reçu que les médecins consultent les psychanalystes. C'est bel et bien du côté des médecins que se trouve la résistance massive, le repli quasi psychotique à l' encontre de la psychanalyse, et il n'est malheureusement pas rare d' entendre, au cours même d'une consultation chez un médecin, les propos les plus scabreux, faux, méprisants à l'égard de la psychanalyse et des psychanalystes : une telle réaction face à un névrosé qui demande une introduction conduit plus d'une fois à une aggravation que la chimiothérapie souvent inadaptée, -l'essentiel de la formation des médecins étant effectuée par les visiteurs envoyés par les laboratoires pharmaceutiques- , et quand ce n' est pas qu' une aggravation, aboutit trop souvent à des suicides qu'on peut dire directement provoqués par la surdité et le manque de tact, pour ne pas parler de la psychopathologie du médecin, enterrée sous un fatras défensif contre la psychanalyse qui provoque une réaction contre-transférentielle agressive mortifère chaque fois qu' un patient, pour son malheur, demande conseil ; je ne suis à ce jour, pas du tout convaincu que seule le masochisme de tel patient dans le choix de son médecin soit la seule mise en cause possible dans ce type « d' accident » que l' on pourrait très largement éviter si l'Ordre des Médecins s'occupait de ses propres charlatans au lieu de les pousser à combattre des cliniciens qui eux au moins savent de quoi il retourne et ne comprennent pas très bien pourquoi ils devraient encore continuer longtemps à se taire sur des pratiques insoutenables dans quelqu' ordre que ce soit.


Vous n'oubliez pas, si vous pratiquez ce blog ponctuellement, qu'il est issu de la chasse aux sorcières contre les psys initiée par un médecin sous le prétexte mauvais d'une vengeance personnelle, dont le fait déclencheur n'est d'ailleurs établi que très vaguement, par un simple dire qui demande à être cru sur parole, la parole d'un qui vaut mieux que faits, arguments et preuves ; qu'une telle chasse au sorcière fasse suffisamment de bruit pour mener l'agitateur à une position éminente, c'est une chose étrange; que les conséquences de l'agitation soient ensuite étouffées car elles pourraient bien profiter aux psys quand on souhaitait qu' elle les éliminât, c' est encore plus étrange. Il faudra bien un jour que l' instigateur s' explique devant le tribunal de la raison.


Mais le constat que cette campagne, qui a agité le bonnet des médecins, et dans le sens innocemment imprévu de faire entendre à certains d' entre eux, qu'ils devaient largement user de leur position, ou pour refuser de soigner, ou pour refuser d' indiquer, et jusqu'à déconseiller les seuls soins adaptés, laisser mourir les patients venus là en toute confiance, ce constat n'est pas étrange, mais amer, et malheureusement, réaliste. J'invite les spécialistes de l'inconscient que mes propos choquent d'en débattre ici ou par e-mail. Je ferai ici état quoi qu'il en soit des protestations éventuelles de mes collègues si certains devaient trouver mes propos déplacés. Cela nous mènera sans doute à des perspectives intéressantes sur la création des paranoïas plurielles.



Cela étant, il y a également des pôles d'excellence, des lieux pour lesquels le terme n'est pas ridicule. L' IRC de Toulouse en est un exemple, et cela s'y manifeste à chaque endroit et à chaque corps de métier, compétence, ouverture, gentillesse, sourires. Quelque chose qui ne se simule pas, croyez-moi. C'est très dommage que cette excellence serve trop souvent à rattraper les dégâts provoqués en amont par des consignes contradictoires, contre productives, incohérentes sauf dans leur létalité.


Pour ne pas terminer sur une note triste, tous mes remerciements à mes amis médecins de leurs efforts, de leur courage, de leur pugnacité dans ces temps d' aberrations géantes.




1 commentaire:

Anonyme a dit…

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